Peut-on dire que les hommes aiment tellement la vérité qu’ils voudraient que ce qu’ils aiment soit vrai ?

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L'analyse du professeur


Le problème posé par ce sujet est celui de savoir dans quelle mesure la valeur de la vérité est au-dessus de toute autre valeur. Plus exactement, si le prix du vrai semble incontestable en tant que tel, en tant que but et que fin, faut-il en déduire pour autant qu’une telle fin justifie tous les moyens, même les moyens les plus éloignés, voire les plus contradictoires avec cette fin ? La vérité peut-elle risquer le mensonge, le parjure, la trahison ? Autrement dit, la vérité peut-elle aveugler l’homme au point où il perd tous ses repères et finit par se perdre dans une quête sans fin du vrai qu’il ne connaît même plus. Ce sujet interroge donc la capacité humaine à trouver le vrai et à en faire le moyen et la force de son existence. Se trouve implicitement en jeu le sens du vrai. Ce que l’on définit comme le vrai est l’adéquation de la chose observée empiriquement et de la théorie qui la décrit. Pourtant, la théorie est un système de connaissances qui formule des hypothèses explicatives dont l’homme n’est jamais totalement sûr qu’elles soient adéquates à la chose décrite. La connaissance suppose donc de faire des choix explicatifs qui laissent une marge d’incertitude. Comment se déterminent de tels choix ? Le problème devient particulièrement sensible dans la mesure où les choix opérés peuvent répondre à une logique morale : l’homme peut choisir de privilégier une hypothèse parce qu’elle le conforte dans ses besoins, dans ses attentes ou dans ses projets. Le vrai devient donc seulement probable, et peut même s’avérer faux parce que l’homme a voulu a tout prix faire correspondre la réalité à ses souhaits.

(...)

Plan proposé

Partie 1

a

Il paraît de prime abord évident que le vrai est objectif. Toute connaissance se fonde en effet sur une expérience objective au cours de laquelle l’homme constate et cherche à comprendre.

b

L’homme est donc dans une situation d’analyse qui a pour but de découvrir le vrai et non de l’imposer ou de la choisir. L’amour du vrai n’est en ce sens que postérieur à la production de la connaissance. L’homme aime le vrai parce que le fait de le posséder lui permet de mieux expliquer son monde.

c

Dès lors, il y a souvent un fossé irréductible entre ce que l’homme aime et ce qui est vrai, et ce fossé, s’il peut décevoir les attentes de celui qui connaît, entraîne la dévalorisation de ce qu’il aime au profit de ce qu’il sait.

Partie 2

a

Toutefois, l’amour de la vérité peut se transformer en passion néfaste puisque l’homme est par nature un être fini qui ne trouve pas toujours la vérité. En effet, si l’homme prend conscience de la valeur du vrai, il peut vouloir le découvrir à tout prix pour fonder son action.

b

Dès lors, il se trouve dans une situation où la tentation d’atteindre le vrai est plus forte que la capacité à l’obtenir. Il peut alors être conduit à falsifier ses résultats et à sur-interpréter ce qu’il voit.

c

En ce sens, comme l’homme n’a pas toujours les capacité de connaître le vrai, il peut être tenté de faire en sorte que ce qu’il aime devienne vrai, à défut de pouvoir aimer ce qui est vrai.

Partie 3

a

Ce constat conduit alors à penser que la conscience du vrai doit, dans l’action, être limitée par la mesure et l’esprit de justice. En d’autres termes, l’homme doit apprendre à se contenter du probable, à défaut du vrai.

b

En ce sens, l’homme doit trouver la juste mesure entre sa passion de la vérité et son honnêteté intellectuelle, de façon à ce que sa volonté de vérité prime toute autre passion, sans pour autant mettre en péril le vrai.

c

Ce constat engage alors à prendre conscience de la séparation nécessaire entre objets d’amour et objets de connaissance. Si l’homme doit apprendre à aimer le vrai, il doit également apprendre à ne pas aimer que le vrai, et à définir ainsi ses goûts et ses priorités indépendamment de la recherche du vrai.