Peut-on accorder une valeur à une croyance que l’on ne partage pas ?

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L'analyse du professeur


Le but de ce sujet est de faire réfléchir à ce qu’est une croyance. Il semble a priori que la croyance n’implique pas le raisonnement. Elle est une forme d’adhésion sentimentale à une chose qui donne une valeur subjective à cette chose. La valeur de la croyance paraît donc soumise au fait de croire. Or, la notion de valeur semble permettre plus qu’une telle adhésion sentimentale. En effet, la valeur dépend du critère d’évaluation, c’est-à-dire que la valeur suppose un jugement de valeur, autrement dit une certaine forme d’usage de la raison. C’est cet usage qui semble problématique dans la croyance puisque l’adhésion sentimentale n’est pas vraiment un travail de la raison.

Nous sommes donc confrontés à une forme de paradoxe selon lequel la croyance donne une valeur à une chose sans que cette valeur ne procède d’un raisonnement. Or, si nous ne partageons pas la croyance, nous ne pouvons en comprendre la valeur, alors même que cette valeur est bien réelle pour celui qui adhère à la croyance. Nous sommes donc placés dans la nécessité de justifier une valeur à partir de la raison alors même que la croyance exclut une telle justification rationnelle.

(...)

Plan proposé

Partie 1

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Nous pouvons d’abord partir du constat selon lequel une croyance à laquelle nous n’adhérons pas exclut le fait d’accorder à la chose crue de la valeur. De fait, une croyance que l’on ne comprend pas nous semble naïve puisqu’elle ne procède pas d’un raisonnement mais d’un sentiment,

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réductrice dans la mesure où elle exclut une analyse des autres manières de croire

c

et handicapante puisqu’elle empêche d’apercevoir les autres valeurs et les autres comportements possibles.

Partie 2

a

Pourtant, si l’on songe au fait que nous avons nous-mêmes des croyances que les autres ne comprennent pas forcément, nous devons reconnaître que nous n’aimerions pas qu’ils méprisent nos croyances et ne leur donnent aucune valeur. Nous sommes donc engagés à respecter des croyances que nous ne partageons pas parce que nous en avons nous-mêmes, c’est-à-dire parce que nous comprenons l’utilité de telles croyances, non seulement parce qu’elles obligent réciproquement autrui à respecter les nôtres,

b

mais en outre et surtout parce qu’on sait qu’elles jouent pour ceux qui y croient un rôle de conseil moral

c

et d’assurance psychologique non négligeable.

Partie 3

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Toutefois, ce respect de la valeur des croyances n’est que négatif et n’est pas un respect de la valeur de la croyance proprement dite. Ce que nous respectons ici est l’autre et non véritablement sa croyance, qui n’a aucune valeur pour nous.

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Il faut donc s’interroger sur la possibilité d’accorder une valeur à une croyance que l’on ne partage pourtant pas rationnellement. Autrement dit, il est possible de penser qu’une croyance possède un pouvoir de conviction par la force des sentiments qu’elle suscite,

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ou encore par sa puissance morale, c’est-à-dire par le fait qu’elle permet de bien agir et de se guider dans le domaine de l’action.