Nietzsche, L’Antéchrist, paragraphe 54

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L'analyse du professeur


L’antéchrist est un ouvrage au titre par lui-même problématique : souvent considéré comme un brûlot anticlérical, cet ouvrage est souvent méconnu dans son ambiguïté fondamentale, puisqu’il met autant en garde contre les dangers de la croyance aveugle que contre ceux d’une attitude morale cynique, ne prenant pas au sérieux la nécessité d’une affirmation libre des valeurs, seul moyen adéquat d’une réelle expression de la volonté de puissance.
Dans le texte qui est ici soumis à notre étude se trouve d’ailleurs valorisée l’attitude sceptique, mais non pas dans son pouvoir de doute. N y défend en effet la nécessité d’une affirmation morale conduisant à une transcendance véritable, par laquelle celui qui agit parvient se libérer des convictions sclérosantes. Pourtant, une telle affirmation est problématique : celui qui l’effectue ne place-t-il pas, de fait, dans une attitude nihiliste tout autant stérilisante ?
Nous nous attacherons à montrer que N propose d’abord une définition de l’attitude qui n’en accentue pas le potentiel destructeur, mais valorise au contraire la capacité à affirmer un sens moral. Nous en viendrons alors pour quelles raisons N en vient à défendre la nécessité d’une liberté morale passant par l’affirmation d’une volonté autonome. Nous parviendrons enfin à saisir les conséquences de la thèse de N, en tant qu’elle engage le rejet de l’enfermement moral de celui qui s’enferme dans ses convictions.
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