Marx & Engels, remettre la conscience à sa place

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L'analyse du professeur


La chute du Mur de Berlin rime souvent aujourd’hui avec la fin des idéologies. Réactualisant en 1992 une analyse qu’avait déjà proposé Daniel Bell en 1960 (La fin des idéologies), Francis Fukuyama a pu, dans La fin de l’histoire, chercher à montrer que l’analyse marxiste de l’histoire était désormais chose passée, et que les conditions contemporaines de réflexion politique illustraient en ce sens la réalisation de la prophétie hégélienne de la « fin de l’histoire ». Si cette thèse a été très critiquée, c’est en grande partie en raison des raccourcis qui la caractérisent, et plus précisément du fait qu’elle ne saisit pas réellement le sens du matérialisme historique, en tant notamment que lecture critique des idéologies et de leurs conditions de production.
Le texte qui est ici soumis à notre étude pourrait à cet égard être considéré comme une réponse anachronique aux raccourcis de Fukuyama, puisqu’il défend la thèse selon laquelle les processus de rationalisation de l’agir humain ne sont que des idéologies, qui s’exposent, tous autant qu’ils sont, à apparaître comme des discours partiaux cherchant à imposer comme universelle une interprétation en fait particulière de la réalité. Il s’agit donc de montrer que la rationalisation de l’histoire, qui préside à la construction du discours idéologique, est fausse, et que l’idéologie est dès lors un discours fallacieux dont il est nécessaire de s’affranchir pour comprendre la vie telle qu’elle est. L’enjeu de ce texte n’est donc pas simplement théorique, puisque la déconstruction de la figure de la conscience rationnelle, en tant que cette conscience est également et simultanément pratique, implique une critique de la façon dont les idéologies façonnent les règles sociales, et justifient le fonctionnement d’une organisation démocratique et capitaliste.
Nous chercherons à montrer que ce texte est structuré en deux temps de démonstrations. Il débute tout d’abord par une analyse épistémologique de la rationalisation hégélienne de l’histoire, qui doit en fait, puisqu’elle est matériellement déterminée, être critiquée, et interprétée comme un discours partial et fantasmé. Cette démonstration permet alors de défendre la thèse selon laquelle la représentation rationnelle de la réalité, et les règles qu’elle formule, ne sont que des idéologies dont il faut se libérer, afin de comprendre la vie même, et la façon dont les conditions d’existence sont réellement produites.
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