L’idée d’inconscient exclut-elle celle de liberté ?

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L'analyse du professeur


La psychanalyse freudienne est célèbre pour avoir construit l’hypothèse de l’inconscient, et mis ainsi au jour un système théorique limitant le pouvoir que l’individu conscient prétend avoir sur ses actions. Souvent décrié, ce système théorique ne se veut pourtant pas un système absolu, qui passerait implicitement, mais fermement, de l’hypothèse à la certitude. Tout au contraire, Freud montre que l’inconscient est une hypothèse qui permet à la fois de mieux analyser l’action de l’homme, et de fournir à chacun les outils pour s’affranchir des déterminismes psychiques qui pèsent sur la réalisation des actes. Une tension caractérise toutefois le jeu de ces deux atouts de l’analyse de Freud. D’une part, comme explication théorique, l’hypothèse de l’inconscient affirme clairement que le moi conscient n’est pas maître dans sa propre maison, et risque d’être le jouet de la tyrannie d’un autre lui-même inconscient. Mais d’autre part, la possibilité de la thérapie psychologique semble indiquer la possibilité de ne pas accepter le déterminisme inconscient, et de s’en libérer. L’idée d’inconscient exclut-elle celle de liberté ? Interprétée de façon littérale, cette question semble appeler une réponse évidente : si l’idée d’inconscient a une quelconque réalité, elle implique nécessairement l’exclusion de la liberté, puisque l’homme est le jouet d’une force occulte qu’il ne peut appréhender consciemment. La question semble toutefois plus complexe, dans la mesure où les deux idées ne sont pas nécessairement antithétiques, si tant est qu’elle ne soient pas affirmées ensemble. Autrement dit, l’idée d’inconscient pour pousser un homme à réaffirmer sa liberté effective. Dès lors, le problème qui se pose est celui de savoir dans quelle mesure l’idée d’inconscient peut être à l’origine d’une prise conscience, et d’une action contre les effets de l’inconscient. Nous chercherons tout d’abord à montrer que l’idée d’inconscient semble par définition s’opposer à celle de liberté, dans la mesure où le fait de réaliser la présence de l’inconscient en soi impliquerait la négation de son pouvoir de liberté (I). Ce constat nous engagera toutefois à réfléchir aux possibilités thérapeutiques qui s’offre alors à celui qui prend conscience de son inconscient. Nous nous attacherons ainsi à montrer que la liberté passe par une prise en compte du poids de l’inconscient dans l’affirmation de la responsabilité (II).

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Plan proposé

Partie 1

a

L’hypothèse de l’inconscient a été formulée par Freud pour expliquer des actes dont l’homme ne pouvait rendre raison consciemment. Elle est donc une hypothèse concurrente de la liberté consciente, et exclue ainsi par principe l’exigence de liberté.

b

D’un point de vue pratique, la conscience de l’inconscient est, pour un individu donné, éminemment inhibitrice, au sens où le fait de réaliser le poids que joue effectivement l’inconscient pousse l’homme à se dessaisir de sa responsabilité et de sa liberté, pour imputer l’origine de ses actes à cette force occulte du moi.

c

En outre, au-delà de ce que l’inconscient pourrait effectivement expliquer, la prise en compte de l’idée d’inconscient renforce la fragilité psychologique du sujet, qui aura dès lors tendance à imaginer que l’inconscient le détermine, quand bien même il ne pourrait le prouver. L’inconscient devient dès lors une force tutélaire qui sert d’excuse à celui qui ne parvient pas à assumer ses actes propres.

Partie 2

a

Cette tendance individuelle à la mauvaise foi n’est cependant pas la règle, dans la mesure où le sens de la thérapie psychanalytique est au contraire de permettre à l’individu de se libérer des facteurs inconscients de ses actes.

b

Il devient donc nécessaire de rééquilibrer le rapport entre idée d’inconscient et idée de liberté, pour montrer au contraire que l’hypothèse de l’inconscient n’a de valeur que dans un cadre scientifique et pratique, tant parce qu’elle permet de concevoir les limites de la conscience, que parce qu’elle permet de repousser ces limites, et d’élargir le domaine de la responsabilité individuelle.

c

En ce sens, l’idée d’inconscient fonctionne comme une exigence de responsabilisation de soi, et ne doit pas être comprise comme radicalement exclusive de la liberté. Tout au contraire, l’idée d’inconscient renforce la liberté individuelle, si tant est qu’elle permet de mieux en saisir les enjeux et le devenir.