L’homme peut-il se libérer de l’histoire ?

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L'analyse du professeur


Dès l’instant où il cherche à interpréter le sens des évènements tels qu’ils se déroulent dans le temps, l’homme ne parvient jamais à trouver toutes les clés de la logique de consécution de ces évènements. Il interprète, mais se heurte à la complexité des causes et des effets. Ce rapport à l’histoire est d’ailleurs doublement paradoxal : l’homme veut comprendre l’histoire, mais ne parvient jamais à se convaincre que le sens qu’il lui donne est objectif, ce qui le conduit à douter qu’il y ait un sens ; et l’homme ainsi semble condamné à penser que le cours de sa vie fait partie d’un cours des évènements prédéterminé sans même pour autant pouvoir adhérer totalement à cette prédétermination, puisqu’elle supprimerait le sentiment de liberté. L’enjeu du sujet : « l’homme peut-il se libérer de l’histoire ? » est donc de savoir comment l’homme peut dépasser le paradoxe du sens de l’histoire pour donner du sens au sentiment de liberté qu’il éprouve lorsqu’il agit.

(...)

Plan proposé

Partie 1

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Tout historien, et même tout individu qui cherche à analyser son vécu, comprend intuitivement le cours d’événements comme logique, en raison même des propriétés ou des catégories de sa raison.

b

En ce sens, il se conçoit comme un élément d’un processus de causalité qui le détermine aussi bien que les autres choses (je ne suis que le produit d’un système d’évènements nécessaires qui expliquent jusqu’à la moindre de mes actions).

c

Dès lors, il serait contradictoire de dire que l’homme pourrait se libérer de l’histoire, puisque la forme même de son intelligence le conduit à voir l’histoire comme une suite nécessaaire.

Partie 2

a

Toutefois, l’homme se distingue de la nécessité propre au déroulement temporel des évènements par le sentiment de sa liberté, c’est-à-dire par un postulat implicite qui fait qu’il s’attribue la liberté d’agir comme une cause première non déterminée par d’autres causes.

b

Cela signifie que l’homme se conçoit comme une exception qui fait l’histoire plus qu’il n’est fait par l’histoire puisqu’il peut choisir, dans une certaine mesure tout au moins, le cours de l’histoire en intervenant de son propre fait.

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Ainsi l’homme se pense, dans son action, comme libéré de l’histoire, c’est-à-dire comme devant paradoxalement expliquer le cours passé par des règles déterministes et des causes nécessaires, qui ne s’appliquent pourtant pas pour lui-même dans le temps présent et lors de ses choix comportementaux.

Partie 3

a

Ce sentiment de liberté est néanmoins de plus en plus problématique puisque la raison, en analysant les conditions de l’action, découvre de mieux en mieux la force des causes qui déterminent chaque événement.

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Dès lors, si l’homme peut se libérer de l’histoire, ça n’est qu’en pensant que le sens de l’histoire passe par l’exercice de sa liberté, c’est-à-dire par un choix nécessaire. Cette idée paradoxale veut dire que je suis maître de mes choix non pas tant parce que pourrais m’extraire de toutes les causes qui me déterminent, mais parce que je sais pourquoi je suis déterminé.

c

La liberté ne peut donc se comprendre que si l’homme se conçoit comme une cause intelligente qui accepte le sens des évènements et choisit en connaissance de cause ce qui le détermine à agir. Il s’agit bien de se libérer de l’histoire en refusant de croire que l’histoire nous laisse libre, mais en acceptant qu’elle nous détermine et que nous ne sommes pas responsables de notre destin. Pour fataliste que soit cette manière de concevoir l’histoire, elle n’en est pas moins profondément morale, puisqu’elle est la seule condition à laquelle un homme peut vivre en paix avec lui-même et s’accorder avec les évènements qui ponctuent sa vie sans qu’ils les aient prévus.