L’homme est-il naturellement bienveillant à l’égard d’autrui ?

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L'analyse du professeur


L’homme peut se définir comme un animal, définition qui pousse à dire que chaque homme est un individu qui se démarque des choses et des autres, et revendique une personnalité dissociable de tout le reste et purement singulière. Nous retrouvons donc ici la définition de l’homme à l’état de nature comme homme de besoin qui connaît comme nécessité première le fait de devoir survivre. Rien ne s’oppose dès lors à ce qu’il exploite toutes les ressources de la nature autour de lui, y compris celles des autres hommes. En ce sens, l’homme n’a pas vraiment de raison d’être moral à l’égard d’autrui et n’a pas nécessairement intérêt à se soucier d’autrui. Toutefois, en tant qu’il est un être rationnel doté d’une conscience intelligente de ce qu’il fait et des moyens de faire au mieux, il s’aperçoit rapidement qu’une existence strictement animale est vite limitée et dangereuse. L’homme peut ainsi se définir politiquement, c’est-à-dire qu’il s’inscrit dans un rapport social de collaboration avec son prochain et se comprend à la mesure des autres. Selon cette définition, il apparaît clairement que l’homme a naturellement un penchant à la sociabilité qui est le point de départ d’une construction culturelle historiquement forgée en compagnie des autres. La première définition de l’homme semble alors en faire une sorte d’animal égoïste naturellement opposé aux autres, alors que la seconde définition paraît en faire un être naturellement bienveillant à l’égard des autres. Comment trancher cette contradiction, qui semble indiquer le paradoxe de l’homme naturel ?

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Plan proposé

Partie 1

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Il convient de partir de la première définition de l’homme en ce que l’animalité et l’individualité semblent s’imposer naturellement pour concevoir l’identité d’un homme qui se pense lui-même comme libre et opposé aux autres.

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La bienveillance ne semble pas primer, puisque cet homme n’a aucune raison de faire confiance à son prochain, qui est animé par la même volonté de satisfaire ses besoins au mieux.

c

Cela indique d’ailleurs moins qu’il n’est pas naturellement bienveillant, mais veut simplement dire qu’il ne laisse pas exprimer naturellement sa bienveillance parce qu’elle ne lui sert à rien.

Partie 2

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À cette première définition de l’homme à l’état naturel, il est possible de répondre en mettant au jour le fait que l’homme est un être intelligent, qui se distingue de l’animal en n’étant pas condamné à un besoin de satisfaction immédiate de ses propres besoins.

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Cette propriété change passablement la donne de son existence naturelle parce qu’il faut bien voir là les moyens non seulement de le distinguer par définition de l’animal, mais plus profondément de comprendre qu’il n’a aucune raison de se comporter comme un animal et d’exercer une force brute pour laquelle il n’a du reste que très peu de dons naturels.

c

Dès lors, il devient concevable de déclarer que l’homme est un être naturellement bienveillant parce que la sociabilité naturelle de l’homme prime, dans son propre intérêt, son animalité.

Partie 3

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Toutefois, une telle sociabilité suppose de l’individu qu’il soit capable de dépasser rationnellement son intérêt particulier pour accéder à une compréhension morale de son rapport aux autres, c’est-à-dire qu’une bienveillance véritable n’est pas seulement mue par l’intérêt mais se trouve également profondément ancrée dans la reconnaissance morale de la dignité de l’autre.

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Or, une telle bienveillance semble être plus le produit des règles politiques que d’une tendance naturelle, puisqu’il est difficile d’imaginer que l’homme ait des raisons de respecter autrui si rien ne vient garantir que ce respect ne sera pas vain.

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Il faut donc moins voir l’homme comme un être naturellement bienveillant au sens où il serait spontanément respectueux d’autrui, mais il faut comprendre qu’il peut par nature manifester une bienveillance, qui ne s’exprime toutefois ou ne se révèle que par un artifice social et culturel.