Aristote, Les Politiques, I, Chap II

Partager sur Facebook Partager sur Twitter


L'analyse du professeur


Fonder la coexistence sociale semble aujourd’hui nécessairement prendre la forme d’un contrat démocratique présupposant que tout homme est libre par nature, et accepte volontairement de coopérer avec les autres parce qu’il y aurait intérêt. Une telle conception est toutefois le résultat d’une longue construction de la pensée politique dont il ne serait pas faux de penser qu’elle se détermine en grande partie en fonction des fondements anthropologiques qui ont été discutés en amont de la justification de l’organisation politique.
Le texte d’Aristote qui est ici soumis à notre étude est en ce sens particulièrement représentatif d’une telle démarche, puisque le stagirite propose ici de concevoir l’existence politique comme une nécessité inscrite dans la nature humaine. La cité est en ce sens le lieu naturel de l’homme : ce dernier ne peut se développer qu’à la condition de vivre dans ce cadre politique, et sans lui l’homme n’est qu’un animal voué à devenir violent et à détruire les germes d’humanité que la nature a place en lui. Pourtant, la cité semble également être un lieu faisant peser des contraintes sur l’homme, et il peut apparaître paradoxal de tenir ces contraintes pour négligeables, voire de les juger utiles au développement de l’homme. Pourquoi la cité est-elle la condition de possibilité de l’humanisation de l’homme ? En quoi l’homme est-il d’abord un « animal politique » ?
Il nous faudra tout d’abord comprendre de quelle manière, aux yeux d’Aristote, la cité apparaît comme le stade ultime de la communauté naturelle. Néanmoins, nous en viendrons à remarquer que ce développement chronologique ne peut masquer le fait que la cité est première dans l’ordre ontologique, c’est-à-dire qu’elle est la réalité par laquelle peut et doit se développer l’homme, l’existence naturelle n’étant alors qu’un commencement et non un fondement. Nous parviendrons alors, et enfin, à saisir pour quelle raison la justice est la vertu fondamentale de l’homme et de la cité.
(...)