Annales BAC 2006 - N’avons-nous de devoirs qu’envers autrui ?

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L'analyse du professeur


Le devoir désigne l’obligation morale qui s’impose à un individu lorsqu’il agit. Cette obligation morale l’assigne à un devoir-être, c’est-à-dire l’enjoint à agir selon une fin qui ne dépend pas de son bon vouloir mais s’impose à sa volonté. Répondre à la question de savoir si nous n’avons de devoirs qu’envers autrui revient alors à poser la question générale de savoir comment se définit le devoir, et à la question plus particulière de comprendre quelle est la place d’autrui dans la définition du devoir. Or il peut semble de prime abord absurde de n’envisager le devoir que comme un rapport à autrui. En effet, on ne voit pas ce qui justifierait que l’obligation morale se borne à la personne d’autrui, qui n’est qu’un élément parmi d’autres dans le monde que nous avons à vivre. Cette évidence se heurte toutefois à une objection majeure, si l’on tâche de définir un peu plus précisément la façon dont nous avons conscience du devoir. Si devoir il y a, il est en effet évident que la règle morale qui s’impose à nous nous oblige vis-à-vis de ce qui n’est pas nous (c’est d’ailleurs le sens littéral de ce que l’on « doit »). Cette règle a donc pour propriété de limiter l’agir d’un individu en considération du respect qu’il doit à autre chose que lui-même. En ce sens, le devoir se justifie parce qu’il entend limite l’intérêt individuel pour protéger une chose aussi digne de valeur que cet intérêt. Il faut donc que la chose soit au moins aussi respectable que l’individu à qui s’impose le devoir. Où se trouve donc justifié le fait que le devoir n’est que devoir envers autrui, puisque seul autrui a une valeur comparable à la mienne. Le problème qui se pose alors est, plus fondamentalement, celui de savoir dans quelle mesure cette conception du devoir est authentiquement morale, puisqu’elle semble en fait purement utilitariste, en ne privilégiant comme critère de devoir que la valeur de chaque individu. (...)