Peut-on concilier les exigences de la justice et celles de la liberté ?

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L'analyse du professeur


Le sujet pose ici le problème de savoir dans quelle mesure justice et liberté auraient des exigences contradictoires. Si nous concevons l’homme comme libre, il apparaît que cette liberté se comprend initialement comme pouvoir de faire ce que l’on veut. Autrement dit, la liberté d’un homme consiste à pouvoir agir selon les déterminations de sa volonté, c’est-à-dire faire des choix et les réaliser. En ce sens, le principe même d’une vie en société, comprise comme vie collective d’hommes libres, semble induire nécessairement des frictions entre les différentes libertés individuelles. Dès lors, le problème principal de la société est de définir des règles de vie commune acceptées par tous. Cela signifie que tous doivent se mettre d’accord pour limiter réciproquement leurs libertés. Le principe de cette conciliation se fonde sur la façon dont chacun pense qu’il est juste de limiter sa liberté propre. À cet égard, la justice de la société (incarnée par les lois) semble résulter directement d’un exercice d’harmonisation des intérêts particuliers et des valeurs des individus.

Or, il n’est pas si évident qu’une telle conciliation puisse se faire de façon simple et non conflictuelle, ce qui conduit à penser que les risques sont grands de voir se creuser une différence entre sens individuel de la justice et définition collective de la justice au moyen des lois. Autrement dit, entre le sens moral de la justice à un niveau individuel et le sens légal de cette justice à un niveau collectif, les divergences risquent de provoquer une contradiction entre les exigences de la liberté et celle de la justice. Il est même possible, à un niveau purement individuel, de penser qu’un conflit du même type peut naître. En effet, entre le sens du devoir que je conçois en moi et le sens de mon intérêt particulier, il peut y avoir conflit, de telle sorte qu’il est possible que je choisisse librement une action que je sais pertinemment injuste.
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