Pensez-vous que la société moderne favorise la création artistique ?

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L'analyse du professeur


Dans Fin de partie, Nagg et Nell cherchent à écrire. Pour le spectateur de la pièce de Beckett, cette tentative qui recherche un peu de sens dans un monde absurde peut paraître vaine. En effet, il semble que la signification ou même le pouvoir de formuler des mots est devenu illusoire, dans un monde désenchanté, sans Dieu, où chaque personne se replie sur elle-même et comprend de moins en moins le langage et la dignité d’autrui. Pourtant, les deux culs de jatte continuent à tenter, comme si le sens était devenu un enjeu crucial que la société rend d’autant plus nécessaire, qu’elle favorise paradoxalement comme une exigence désespérée.

Le rapport de notre société moderne à la création artistique semble, à ce titre, ambiguë. La société démocratique et libérale dans laquelle nous vivons paraît en effet avoir connu une mutation sans précédent dans son rapport à la possibilité de mettre en œuvre les productions esthétiques. Époque de diffusion de masse de la culture, elle apparaît comme un espace de communication favorisé de l’art qui appelle de fait un renouvellement des œuvres. Mais époque de consommation de masse, elle conduit paradoxalement à rendre cette production d’autant plus difficile que l’art répond à des impératifs autres que ceux des problèmes inhérents à la volonté de créer, ne serait-ce qu’économiquement.

Nous nous attacherons donc à montrer tout d’abord que la société comme moderne est une société qui appelle à la création artistique. Mais nous constaterons que cette création rencontre un certain nombre d’obstacles qui, paradoxalement, semble en réduire le champ de possibilité. Dès lors, nous nous interrogerons sur le devenir de l’art contemporain afin de saisir si les obstacles modernes sont véritablement inhérents à la modernité ou ne traduisent qu’une mutation des formes de la création.
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