Le travail et la technique sont ils des moyens de civilisations ou de barbarie ?

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L'analyse du professeur


La critique marxienne de la façon dont le machinisme pouvait modifier la réalisation du travail humain, et favoriser le développement de l’exploitation de l’homme par l’homme, a durablement influencé notre manière de concevoir le travail humain. De fait, il devenait impossible, dans le contexte de l’aliénation économique des hommes, de vanter sans fard les mérites de la technique, et plus encore ceux du travail, déjà déconsidéré moralement et de façon ambivalente par une religion chrétienne l’assimilant à un labeur nécessaire au salut des hommes.
Le travail et la technique sont-ils en ce sens des moyens de civilisations ou de barbarie? La question ici posée porte sur le problème de la signification du travail, et plus particulièrement sur la question de savoir si le travail, tel qu’il se trouve orienté par l’outil technique, est au service de l’existence civilisée. Il semble en effet que le travail est d’abord par lui-même perçu, au-delà de la nécessité vitale, comme un moyen pour l’homme de développer sa raison. Le travail est ce qui cultive l'homme, fait de lui ce qu'il a de spécifique parmi les autres animaux. L’enjeu est ainsi de comprendre en quoi le travail entretient un rapport étroit avec la capacité de raisonner et de construire les conditions de l’existence humaine. Toutefois, et c’est la spécificité de ce sujet, l’outil technique semble donner un sens inédit au travail, en affirmant sa capacité physiquement, voire moralement et socialement, d’aliénation de l’homme. Le travail pourrait à cet égard déshumaniser l’homme, et contredire le processus même par lequel il devient civilisé. Le paradoxe de ce sujet consiste donc à remarquer que le travail s’offre à la fois à comprendre comme une contrainte, puisque l’homme doit travailler au moyen d’une technique qui l’aliène pour produire les conditions de sa survie, et comme un moyen de faire de l’existence quelque chose de proprement humain, c’est-à-dire de transformer le milieu de vie en milieu humain tout en se transformant pour s’adapter à son milieu, et en développant une culture l’extrayant de toute contingence animale.
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