Faut-il libérer ses désirs ou se libérer de ses désirs ?

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L'analyse du professeur


L’ambiguïté du désir tient au fait qu’il paraît nécessaire à l’homme pour vivre tout en ne le satisfaisant jamais vraiment, dans la mesure où l’obtention d’un objet de désir paraît engager nécessairement le renouvellement du principe de désir vers un autre objet. La question que pose alors le sujet « faut-il libérer ses désirs ou se libérer de ses désirs ? » n’est pas tant celle de savoir ce que signifie le désir tant théoriquement que pratiquement. Autrement dit, le problème qui se pose n’est pas celui de la définition du désir ou de son fonctionnement, mais celui de savoir si l’homme doit exercer un contrôle sur ses désirs pour gérer au mieux cette ambivalence du désir et parvenir à être heureux. Le paradoxe sous-jacent à ce sujet est donc celui qui montre que le désir n’a de valeur qu’en cherchant à se réaliser dans des objets particuliers (sa valeur dépend du fait de désirer quelque chose de particulier), tout en constatant que le désir entraîne nécessairement la frustration de celui qui désire puisque l’obtention comme la non-obtention de l’objet du désir conduit le désir à rechercher un autre objet. Faut-il alors se libérer de l’emprise du désir, en raison de la frustration qu’elle engendre toujours, ou cette frustration n’est-elle que relative en comparaison de la valeur réelle du désir, qui tient en fait au fait même de désirer et de donner de la valeur à des objets particuliers ?

(...)

Plan proposé

Partie 1

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Il convient donc d’abord d’analyser la nature du désir pour saisir qu’il est un principe de détermination mentale et non véritablement corporelle, c’est-à-dire qu’il repose sur des représentations de choses désirables et non sur les choses elles-mêmes.

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Cette analyse permettra de constater que l’homme subit ses désirs en fonction de la manière dont il est conscient de lui-même et de sa façon d’exister, c’est-à-dire dans la mesure où il prend conscience de la façon dont les objets autour de lui peuvent lui convenir et lui permettre d’exister mieux.

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À cet égard, libérer ses désirs ne semble pas souhaitable puisque l’homme risque ainsi de souffrir de ce qu’il ne peut atteindre, et se trouver frustré puisqu’il ne parvient pas à atteindre la représentation de soi qu’il s’est forgé à partir de ses souhaits.

Partie 2

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En ce sens, nous sommes conduit à chercher le moyen pour l’homme de se libérer totalement de ses désirs afin de ne pas souffrir, c’est-à-dire de ne pas être prisonnier des représentations ou des images mentales qu’il se fait des objets.

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Il convient alors de penser que l’homme doit chercher à s’élever au-dessus de sa condition de mortel pour tenter de contrôler toute passion en considérant les objets de désirs comme des illusions néfastes dont il peut se déprendre en corrigeant ses propres représentations de soi et du monde autour de lui.

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Se libérer de ses désirs revient alors à renoncer non pas tant à désirer mais à accorder de l’importance aux objets de désirs, et à ne désirer ainsi que les objets qui sont à notre portée et ne sont pas dépendants des choses extérieures à notre volonté.

Partie 3

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Néanmoins, une telle conception de l’homme apparaît comme illusoire. En effet, les désirs procèdent de la conscience humaine et du rapport au monde, et ne dépendent pas de notre décision souveraine. Croire que nous pouvons disposer de nos désirs est en ce sens une illusion.

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Dès lors, il s’agirait plutôt de soumettre les désirs à une analyse rationnelle afin d’en évaluer la possibilité et de ne les libérer que dans la mesure du raisonnable, c’est-à-dire pas nécessairement dans la mesure où ils peuvent dépendre de notre volonté mais dans la mesure où nous possédons des chances raisonnables de pouvoir les réaliser.

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En outre, apprendre à gouverner son désir et à l’affirmer grandit l’homme et lui permet de mieux se saisir de son existence, sans quoi son rapport au monde devient timide et craintif, et son existence s’appauvrit.